Le 23 août 1939, l’Union soviétique a signé un traité de non-agression avec l’Allemagne nazie, le pacte germano-soviétique (ou pacte Molotov-Ribbentrop). A priori, un accord entre communistes et nazis est idéologiquement aberrant, voici les principales explications:
1. Un réalisme stratégique de Staline
Staline savait qu’un conflit avec Hitler était probable à terme, mais il voulait gagner du temps :
L’Armée rouge était affaiblie par les grandes purges (1937-1938) : de nombreux officiers expérimentés avaient été exécutés.
L’URSS n’était pas prête militairement à affronter l’Allemagne.
En signant ce pacte, Staline retardait l’agression allemande, ce qui lui permettrait de réarmer et de mieux se préparer.
2. L’échec des négociations avec les démocraties occidentales.
Contexte général (1938-1939)
Après l’annexion de l’Autriche (Anschluss) en mars 1938 et surtout la crise des Sudètes à l’automne, l’Europe comprend qu’Hitler veut redessiner les frontières par la force. Mais les puissances occidentales adoptent une politique de conciliation (appeasement), notamment à la conférence de Munich (septembre 1938), où la Tchécoslovaquie est sacrifiée sans que l’URSS ne soit consultée.
Cela a profondément humilié Staline, qui en a conclu que la France et le Royaume-Uni n’étaient pas des partenaires fiables face à Hitler.
Tentatives d’alliance défensive avec l’URSS (1939)
– Printemps-été 1939 :
Devant la montée du péril nazi (notamment les revendications allemandes sur Dantzig), Londres et Paris reprennent contact avec Moscou pour envisager une alliance militaire tripartite (France – Royaume-Uni – URSS) en cas d’attaque contre la Pologne.
– Les discussions patinent :
La France et le Royaume-Uni refusent de s’engager formellement à une intervention militaire immédiate.
Les Britanniques ne veulent pas donner de garanties claires à l’URSS sur les États baltes ou la Roumanie.
Moscou demande aussi le droit de faire traverser ses troupes par la Pologne, en cas de guerre avec l’Allemagne. Mais Varsovie refuse catégoriquement (car elle craint une occupation soviétique durable).
Les délégations occidentales sont lentes : elles n’ont ni l’autorité politique ni l’urgence que Staline attend.
Les négociateurs français et britanniques arrivent sans instructions précises, ce qui choque les Soviétiques.
Résultat : méfiance mutuelle, manque de coordination, lenteur, et aucune garantie solide.
Staline en tire une conclusion froide
Il pense que les démocraties veulent que l’Allemagne et l’URSS s’épuisent l’une contre l’autre, pour rester elles-mêmes à l’écart du conflit.
Il comprend qu’il vaut mieux traiter directement avec Hitler, qui offre immédiatement :
La paix temporaire à l’Est.
Un partage de la Pologne et des zones d’influence claires.
Des livraisons économiques en cas d’accord (matières premières contre machines).
Une alliance avec Hitler devient rationnelle
Staline choisit l’option la plus sûre pour les intérêts soviétiques à court terme, malgré l’aberration idéologique d’un accord entre nazis et communistes.
Il dira plus tard :
“Nous avons gagné un an et demi pour renforcer notre défense.”

Un intérêt territorial mutuel
Le pacte comportait un protocole secret : l’URSS et l’Allemagne se partageaient des zones d’influence en Europe de l’Est :
L’URSS récupérait l’est de la Pologne, les États baltes, la Bessarabie.
L’Allemagne pouvait envahir l’ouest de la Pologne sans craindre une riposte soviétique.
C’était donc un pacte cynique, dans lequel deux régimes totalitaires s’entendaient pour se partager l’Europe de l’Est.

Une parenthèse idéologique
Bien que le nazisme et le communisme soient idéologiquement opposés, les deux régimes partageaient :
Une logique autoritaire et impérialiste.
Un mépris commun pour les démocraties occidentales.
Un intérêt tactique à coopérer temporairement.
Conséquences immédiates
Une semaine après le pacte (1er septembre 1939), Hitler envahit la Pologne.
Le 17 septembre, l’URSS attaque à son tour la Pologne par l’Est.
Cela déclenche la Seconde Guerre mondiale.
L’URSS est donc complice de la destruction de la Pologne, avant de devenir ennemie de l’Allemagne à partir de juin 1941 (opération Barbarossa).
Conclusion
Staline choisit le pacte avec Hitler car :
Il obtient plus, plus vite, avec des garanties concrètes.
Il gagne du temps pour renforcer l’Armée rouge.
Il considère que la France et le Royaume-Uni sont faibles et hypocrites, notamment après Munich.