Imed Achour ex-directeur général des Services Spéciaux est arrêté depuis une semaine dans le cadre de l’affaire Chafik Jaraya. On lui reproche d’avoir donné à son subordonné instruction d’auditionner le sulfureux homme d’affaire qui avait reçu de ses amis de Fajr Libya des renseignements sur une opération terroriste en préparation. Le plus risible dans l’affaire est que les renseignements étaient fiables, sans oublier que le rôle du Chef du Renseignement est de protéger le pays, même si cela passe par l’audition de l’ennemi public n°1.
Voici tous les détails de cet imbroglio.

Après avoir été écarté de la police en 2011, sans aucune raison valable, Imed Achour, connu pour son sérieux et son efficacité, a été appelé à la tête de la Direction Générale des Services Spéciaux – qui comprend, entre autres directions, celles de l’antiterrorisme et du Renseignement – après le 3e grand attentat de 2015, celui qui, en novembre, a frappé le bus de la Garde Présidentielle.

Depuis cette date, aucun attentat d’envergure n’a été opéré, Imed Achour y est pour beaucoup, c’est son rôle.

En février 2016, Imed Achour reçoit de Nejm Gharsali, le ministre de l’Intérieur de l’époque, l’ordre d’écouter le sulfureux Chafik Jaraya qui disait avoir des renseignements importants concernant le terrorisme.

Imed Achour confie cette mission à son subordonné Saber Laajili. Il est tout à fait logique que le Directeur des Services Spéciaux demande à son subordonné de recevoir un homme, quel qu’il soit, fut-il le diable en personne, pour obtenir des renseignements concernant la Sureté Nationale, c’est d’ailleurs là son premier rôle.

Le fond de l’affaire

Même si cela est très loin d’être nécessaire pour disculper Imed Achour, voyons le fond de l’affaire : Les renseignements étaient effectivement très importants puisqu’ils concernaient des Tunisiens affiliés à Daech qui avaient réchappé au bombardement US de Sabratha (19 février 2016). Or, l’un des membres de ce groupe, blessé lors du bombardement et interrogé par les autorités de Tripoli, a avoué que le groupe « s’entraînait à commettre des attentats terroristes en Tunisie ».

L’information, parvenue à Chafik Jaraya du fait de ses accointances avec Fajr Libya, concernait, au premier ordre la sécurité nationale tunisienne.

Un ordre venu du ministre de l’Intérieur

Il est donc tout à fait normal que Nejm Gharsali confie l’enquête à ses collaborateurs, et en premier lieu au patron des Services Spéciaux, Imed Achour.

D’où Nejm Gharsali savait-il que Chafik Jaraya avait des renseignements très importants ? Pour l’homme politique Mohamed Abbou, avocat du subordonné de Imed Achour, Saber Laajili, c’est la Présidence elle-même qui aurait demandé – de façon parfaitement justifiée et logique – aux autorités concernées, c’est à dire le Ministre de l’Intérieur, d’examiner l’affaire.

Imed Achour a juste fait son travail

Imed Achour est arrêté depuis une semaine. Nejm Gharsali a bien reconnu, vendredi dernier, lors de son audition, qu’il avait ordonné à ses services d’instruire l’affaire. De toutes façons, le rôle des services de police consiste à obtenir des renseignements, c’est à dire que même si Imed Achour n’avait reçu aucune instruction en ce sens, c’est là son devoir.

Imed Achour n’est pas le seul à être arrêté pour cette affaire. Saber Laajili, son subordonné, chargé de l’antiterrorisme, est arrêté pour la même affaire depuis plusieurs mois. Les charges le concernant sont véritablement abracadabrantes, nous y reviendront avec toutes les précisions nécessaires.

Il est terrible de constater qu’aujourd’hui, les meilleurs professionnels, dans tous les domaines, sont écartés sur des bases farfelues, pour on ne sait quoi, probablement pour couvrir les erreurs et égarements des politiques. Les dommages qu’occasionnent, au sein de la police, de telles affaires sont incommensurables car l’arrestation de hauts cadres qui n’ont fait qu’accomplir leur mission entraîne un sentiment d’injustice qui fragilise énormément l’un des services les plus stratégiques du pays et cela au pire moment, puisqu’une véritable guerre est menée contre le terrorisme. Un sursaut est nécessaire, le pays a un besoin énorme de fiabilité, car la médiocrité a atteint un niveau, à proprement parler, extraordinaire.

Affaire à suivre de très près.


Le témoignage de M. Rafik Chelly et de M. Mohamed Abbou

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